blogue Le financement de projets pour la permanence : une approche novatrice pour soutenir la conservation et le bien‑être des communautés au Canada blogue 13 mins lus 27 Juin 2024 Blog blogue Le financement de projets pour la permanence : une approche novatrice pour soutenir la conservation et le bien‑être des communautés au Canada Le Canada est en voie de devenir le premier pays au monde à avoir cinq initiatives de financement de projets pour la permanence (FPP). Le FPP est un modèle d’investissement innovant pour la conservation. Il permet d’obtenir des engagements majeurs de la part d’une myriade de titulaires de droits et de parties prenantes — y compris tous les niveaux de gouvernement, les communautés, les bailleurs de fonds et d’autres partenaires — pour veiller à ce que les aires de conservation soient bien gérées et financées de manière durable, tout en profitant aux communautés qui en dépendent. Il y a vingt ans, les Premières Nations de la Colombie-Britannique, le gouvernement provincial et des bailleurs de fonds philanthropiques ont signé les accords sur la forêt pluviale de Great Bear et mis sur pied l’organisme Coast Funds, créant ainsi un modèle novateur qui est désormais reconnu comme le premier FPP au monde. Aujourd’hui, quatre nouveaux FPP se développent au Canada. Ces initiatives ont le potentiel d’apporter de nombreux avantages cruciaux et interreliés : respect de la souveraineté autochtone, conservation et biodiversité, santé et bien-être des communautés, vitalisation culturelle et développement économique. Les FPP comptent parmi les premières mesures à grande échelle prises par le Canada qui l’aideront à respecter ses engagements par rapport au Cadre mondial de la biodiversité, notamment la protection de 30 % de ses terres et de ses eaux d’ici 2030. Le premier ministre Trudeau a annoncé jusqu’à 800 millions de dollars pour ces FPP lors de la Conférence de l’ONU sur la biodiversité (COP15) afin d’assurer leur mise en place et de mobiliser des fonds issus de la philanthropie et du secteur privé pour les soutenir. Il était clair en 2022, comme il le demeure aujourd’hui, que le Canada et beaucoup d’autres pays à travers le monde n’atteindront pas les objectifs du Cadre sans l’implication et le leadership des communautés et gouvernements autochtones. Ce qui différencie les FPP au Canada de ceux qui ont récemment été mis en place en Amérique du Sud, par exemple, c’est qu’ils sont conçus et dirigés par des autochtones. Les gouvernements et les communautés autochtones qui mènent le développement des FPP sont des titulaires de droits avec différents modes de gouvernance, par exemple : des droits protégés par la Constitution, des traités négociés, des accords de réconciliation, des accords de transfert de responsabilités et, par-dessus tout, des lois ancestrales découlant des relations et responsabilités d’intendance que les communautés autochtones ont avec les terres et les eaux depuis des millénaires. La philanthropie joue un rôle important en aidant à financer la mise sur pied des FPP en collaboration avec la Couronne. Les entités philanthropiques soutiennent également les leaders autochtones dans leurs nombreuses négociations avec les autres paliers gouvernementaux. Pour en savoir plus, Devika Shah d’Environment Funders Canada a rencontré Carolynn Beaty de la Sitka Foundation ainsi que Meaghan Calcari Campbell et Mary Turnipseed de la Gordon and Betty Moore Foundation. Ces trois femmes qui œuvrent en philanthropie ont à cœur la réussite de ces quatre FPP. En quoi le FPP diffère-t-il des autres modèles de conservation? Notre travail collectif est souvent en proie à des difficultés, notamment lorsque les partenaires doivent composer avec du financement fragmentaire ou insuffisant pour la gestion des aires de conservation. Le modèle du FPP surmonte ces problèmes en fournissant tout le financement nécessaire en un seul temps, empruntant au secteur financier l’approche « à clôture unique » pour le développement de grands projets (p. ex. projets de panneaux solaires). Le FPP permet également d’assurer une intendance à long terme, bien après que les protections ont été établies. Au lieu de négocier du financement pour la conservation et l’intendance année après année ou de conclure des accords avec chaque gouvernement, le FPP englobe tout le financement ainsi que les engagements en matière de gouvernance, de politiques, de finances et de réglementations nécessaires pour protéger les paysages terrestres et marins qui sont au cœur des ententes. À l’instar des accords pour financer de grands projets commerciaux ou industriels, cet accord de financement de la conservation assure le développement d’un projet jusqu’à ce que celui-ci soit pleinement mis sur pied (« construit ») et durable. Bien sûr, comme dans toute initiative de grande envergure, le concept de financement « à clôture unique » ne porte pas très bien son nom, car le travail se poursuit de façon continue dans la communauté afin de concrétiser les accords. Un des points communs des quatre FPP en développement au Canada, c’est qu’ils font progresser la réconciliation de manière concrète, conformément aux droits, aux valeurs, aux objectifs et aux forces de chaque organisation responsable du FPP. Chacune de ces initiatives énonce clairement ses motivations : procurer des avantages communautaires touchant la gouvernance autochtone, l’emploi local, les capacités commerciales, la formation, les savoirs traditionnels, la surveillance et l’intendance actives ainsi que les infrastructures axées sur la conservation. Bien que chaque FPP varie selon les circonstances particulières des communautés concernées, ces initiatives ont toutes en commun un plan de conservation, un plan de bien-être communautaire (aussi appelé plan de diversification économique ou plan d’économie de conservation) et un modèle financier pour atteindre les objectifs. La conservation et les avantages communautaires sont fondamentalement liés dans ces FPP, ce qui permet aux leaders autochtones de négocier avec les gouvernements de la Couronne sur ces deux points en même temps. Nous avons vu que les FPP surmontent beaucoup des obstacles qui entravent les efforts individuels de conservation, notamment en ce qui concerne les relations, le financement, l’élaboration et la mise en œuvre de politiques et l’obtention de l’attention des niveaux de gouvernement nécessaires. Grâce à l’approche holistique et aux objectifs d’ensemble du FPP, il est possible de relever certains de ces défis en travaillant à l’échelle des systèmes. Par exemple, le FPP peut faire participer tous les ministères pertinents d’un gouvernement de la Couronne plutôt que d’en impliquer un seul avec une compétence plus étroite. Le FPP constitue un mécanisme puissant, qui donne un élan pour débloquer simultanément les relations, le financement et la gouvernance. Enfin, ces initiatives couvrent des paysages terrestres et marins dans leur ensemble, ce qui offre une approche durable et intégrée pour assurer le soin et la protection des terres, des cours d’eau et des communautés. Tout le travail est fait en tenant compte des réalités et des visions du monde des peuples autochtones de ces régions. Pourquoi est-il si important que votre fondation appuie ce travail? Les FPP sont des initiatives vraiment intéressantes parce qu’elles permettent aux partenaires et aux organisations philanthropiques impliquées de traiter plusieurs priorités à la fois. Chacun des FPP proposés au Canada protégera de vastes écosystèmes, qui sont en grande partie intacts et qui méritent une conservation et une gestion durables. Ceci sera possible grâce à une intendance à long terme assurée par les autochtones. Le FPP favorise également la création d’emplois et la prospérité économique au sein des communautés isolées. Des surveillants autochtones (souvent appelés « gardiens ») prennent soin des terres et des eaux, restaurent les espèces en péril, identifient et entretiennent des sites ayant une importance culturelle, effectuent des recherches et assurent la préservation et la transmission du savoir autochtone. En soutenant ces programmes, nous investissons dans la santé et le bien-être des communautés, la sécurité alimentaire, la vitalisation linguistique et culturelle, la conservation durable et le développement économique durable. Quels impacts du FPP constatez-vous jusqu’à présent? Alors que les leaders autochtones approchent de la clôture des quatre FPP cette année, chaque équipe a déjà franchi des étapes importantes. Par exemple, le plan d’action pour le réseau des aires marines protégées de la mer de Great Bear a été publié en février 2023. Ce plan d’action constitue un élément essentiel du plan de conservation du FPP de la mer de Great Bear. En octobre 2023, les dirigeants des FPP de Qikiqtani et des Territoires du Nord-Ouest ont signé des ententes de principe avec les gouvernements de la Couronne. En février 2024, l’équipe du FPP de l’Omushkego Wahkohtowin et Parcs Canada ont annoncé l’achèvement de l’étude de faisabilité de l’aire marine nationale de conservation proposée, un élément essentiel du plan de conservation de ce FPP. Le même mois, le premier ministre de l’Ontario a également exprimé son appui à la vision de l’Omushkego, qui concilie conservation, prospérité des communautés et développement des ressources. Toutes ces réalisations sont importantes pour les collectivités et les partenaires. Elles reflètent le cheminement unique de chaque FPP. Nous constatons qu’il y a de nombreuses façons dont les gouvernements et les organisations philanthropiques peuvent participer aux FPP; ce sont des initiatives qui permettent d’inclure une grande diversité de partenaires. Qu’un bailleur de fonds rejoigne un FPP pour aider le climat, la conservation, la santé économique, le bien-être communautaire, la sécurité alimentaire ou la réconciliation, le FPP comporte ces éléments individuels, tout en adoptant une approche globale et intégrée. La gouvernance des FPP est très dynamique. Elle reflète l’évolution d’accords de gouvernement à gouvernement qui sont parfois centenaires. L’approche de résolution de problèmes adoptée dans le cadre des FPP constitue un exemple réel et concret d’innovation et de collaboration. Les FPP poussent également les gouvernements de la Couronne à respecter leur approche pangouvernementale, car divers organismes de l’État y participent pour atteindre les nombreux objectifs complémentaires. Nous avons bon espoir que cela créera un précédent important quant au respect des engagements du Canada pour la conservation menée par les autochtones, tant à l’échelle nationale que mondiale. La somme des parties est d’ailleurs plus grande que le tout : les quatre FPP sur notre continent favorisent les relations et le partage de connaissances entre les leaders autochtones. Il y aura sans doute beaucoup de leçons à tirer de tous les FPP, à mesure que nous approchons de leur clôture et de leur mise en œuvre. Le FPP représente à la fois la poursuite des efforts et le commencement d’un nouveau chapitre. Ces initiatives proposent une manière différente de soutenir la conservation et le bien-être, qui au fond, sont une seule et même chose. Quelles leçons avez-vous tirées de votre participation aux FPP? Pour en savoir plus sur la mise en œuvre et les impacts du tout premier FPP, dans la forêt pluviale de Great Bear, consultez ce rapport d’impact qui couvre une période de 15 ans. Nous avons beaucoup appris à mesure que ces FPP se développent, et nos apprentissages se poursuivront sans doute, avec les responsables autochtones. Le point le plus important à retenir, c’est que le financement philanthropique peut jouer un rôle de catalyseur et mobiliser les gouvernements de la Couronne, qui disposent de fonds beaucoup plus importants. Les engagements pris au début de 2022 en matière de financement philanthropique ont donné l’assurance aux leaders autochtones responsables des FPP que le secteur philanthropique croyait en leurs visions et leur donnerait un appui financier complet. Ces premiers engagements ont été essentiels pour donner confiance que les contributions du gouvernement fédéral seraient mises à profit, ce qui a aidé à obtenir la somme de 800 millions annoncée par le gouvernement fédéral en 2022 pour les FPP. Les subventionneurs et partenaires à la mise en œuvre de ces initiatives apprennent réellement comment soutenir la conservation menée par autochtones. En tant que bailleurs de fonds pour la conservation, les partenaires nous ont souvent rappelé qu’ils sont motivés par les avantages communautaires des FPP autant, sinon plus, que par les avantages en matière de conservation. Les bailleurs de fonds qui appuient les FPP sont en train d’apprendre ce que les communautés savent depuis toujours : dans les régions couvertes par les FPP, si les écosystèmes sont en santé, les gens sont en santé, et vice‑versa. Les quatre FPP au Canada permettent aux bailleurs de fonds dans les domaines de la conservation, du climat et du développement communautaire d’en apprendre davantage sur la valeur de ces initiatives et d’apprécier toute l’étendue des bienfaits qu’elles apportent. FPP est le terme que nous employons aujourd’hui pour concilier tous ces intérêts mutuels, mais ces visions existent au sein des communautés autochtones depuis des temps immémoriaux. Les organisations philanthropiques et les gouvernements de la Couronne changeront au fil du temps, mais les communautés autochtones continueront à porter leurs visions pour les années à venir. Quel message avez-vous pour les autres bailleurs de fonds quant aux raisons de financer les FPP? Une dizaine de membres d’EFC ont promis, ont accordé ou envisagent de verser des subventions se chiffrant entre 50 000 $ et 10 M$ à un ou plusieurs des quatre nouveaux FPP canadiens. Compte tenu des lacunes de financement qui subsistent et de l’envergure, du leadership et du potentiel de transformation de ces initiatives, il y a encore beaucoup d’occasions pour les membres d’EFC d’appuyer les efforts menés par les autochtones. Nous sommes témoins que l’union fait la force. Nous avons eu le privilège de constater de visu l’élan extraordinaire que les FPP peuvent prendre. Le soutien accordé par les organisations philanthropiques canadiennes accroît la durabilité des FPP, tout en démontrant le leadership du Canada, tant à l’échelle nationale que mondiale. En participant aux FPP, les bailleurs de fonds ont l’occasion de financer des entités autochtones incroyables et d’apprendre de celles-ci, à mesure qu’elles œuvrent pour concrétiser leurs visions transformatrices en faveur de la conservation et du bien-être des communautés. Nous lançons donc une invitation aux bailleurs de fonds à entrer en relation avec les leaders et les communautés autochtones. Beaucoup de bailleurs de fonds expriment un désir d’apprendre et de créer des relations en ce sens, mais souvent, ils ne savent pas par où commencer. Les FPP représentent un excellent moyen de rejoindre une communauté de bailleurs de fonds qui apprennent ensemble afin que nous puissions tous accroître les impacts des fonds que nous gérons. C’est une grande fierté pour nous de voir les organisations de notre réseau consacrer des ressources afin de soutenir les FPP et d’apprendre ensemble à être des partenaires et des subventionneurs plus efficaces. Nous espérons que d’autres bailleurs de fonds se joindront à nous. Partager cet article Facebook Twitter LinkedIn Email
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